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Recherche de la perfection

Je viens d’emménager dans mon nouvel appartement.

Il est spacieux et assez lumineux.

Situés en plein centre-ville, les commerces sont à proximité, ce qui est bien pratique.

Je commence par aménager avec soin le séjour.

Les enceintes acoustiques décrivent un triangle équilatéral parfait avec le centre de mon canapé en cuir.

C’est un trois places, et j’occuperai toujours celle du milieu pour écouter de la musique.

Dans la vie, il faut être perfectionniste !

Le téléviseur est placé au millimètre près entre les deux enceintes.

On est perfectionniste ou on ne l’est pas.

Dans la chambre, j’ai également installé une petite chaîne avec lecteur laser.

Les enceintes sont en face de moi, sur un meuble.

Il me faudra rester impérativement au centre du lit pour profiter pleinement de la stéréo !

Les robinets ne me plaisent pas.

Il me faut les changer.

J’achète de superbes mitigeurs à prix d’or.

L’installation est difficile à réaliser, mais j’y parviens.

La chasse d’eau est bruyante et le réservoir long à se remplir.

Je change le système.

Même les toilettes sont parfaites.

Dans la vie, il faut rechercher la perfection !

Mon couloir est bien nu.

Je décide d’accrocher un tableau au mur.

Il est assez lourd, une fixation solide est nécessaire.

Je dois faire un trou.

Je calcule avec la plus extrême précision la position de ce trou.

Un petit décalage me serait insupportable.

C’est fait.

Je sors ma perceuse et attaque le mur.

Au bout de dix minutes, il est toujours intact.

Une dureté incroyable !

Ma perceuse n’est pas assez puissante.

Au volant de ma voiture, je fonce.

Le plus grand magasin de bricolage de la ville ne doit pas encore être fermé.

J’avais vu juste.

Le choix est important.

Je reste en arrêt devant la plus chère, la plus grosse, la plus puissante.

Son mandrin, énorme, est à ma mesure !

Une boîte de forets m’est offerte, c’est justement ce qu’il me faut.

De retour chez moi, je règle ce formidable engin à son maximum.

J’attaque à nouveau le mur.

En percussion, le bruit est infernal.

J’appuie de toutes mes forces.

C’est toujours aussi dur, mais le foret avance lentement.

Épuisé, je marque une pause.

On sonne…

Je m’essuie le front et vais ouvrir la porte d’entrée.

Deux policiers me font face.

« Vous êtes en état d’arrestation ».

J’ai droit aux menottes.

Je viens d’être jugé, j’en ai pris pour dix ans.

De l’autre côté du mur, il y avait une banque…

Et pas n’importe quelle banque.

C’était la Banque de France !

On est perfectionniste ou on ne l’est pas…

© PF/Grinçant.com (Projections 1992-1993)

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