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La bave du chien noir

AVERTISSEMENT : Ce billet date de plus d'un an.

C’était le 21 novembre 2021.
Sentier de randonnée récupéré sur le Net et transféré sur ma tablette.
Pas grand intérêt, des chemins et des petites routes de campagne, histoire de faire treize kilomètres.
En plus, la météo était grisâtre, tristounette, et même avec du crachin à certains moments.
J’étais accompagné d’une amie, et nous discutions au fil des pas.
C’est en dépassant ce chien, sur la gauche, que j’ai compris.
Un chien noir, ordinaire, une vingtaine de kilos, tapi sur le talus.
Mais il avait un regard spécial, vicieux, malsain, retors.
Dès qu’il fut derrière nous, il se leva, et se montra d’une grande agressivité.
En aboyant et en montrant les crocs, en se baissant comme s’il allait attaquer.
Devant, à environ quatre-vingts mètres, sur la gauche, il y avait une maison, avec une voiture garée.
J’ai compris que j’avais raté un embranchement, et que nous aurions dû tourner un peu plus tôt.
Pas de panneau « propriété privée », pas de barrière, non, juste ce chien noir.

Que voulait-il ? Il nous empêchait de rebrousser chemin. Et dès que nous faisions mine d’avancer, il passait devant nous pour nous barrer le passage.
Méthode simple, ne jamais avoir peur, et toujours regarder l’animal dans les yeux.
Mais là, il avait deux cibles avec quatre jambes/mollets, et il essayait de nous choper d’une façon ou d’une autre.
Avec ma compagne de randonnée, nous nous sommes livrés à une curieuse chorégraphie qui a consisté à reculer/rebrousser chemin tout en lui montrant que ça ne serait pas facile de nous avoir.
Enfin, nous sommes revenus à l’embranchement raté, mais il a continué son manège pendant encore une trentaine de mètres avant de lâcher finalement prise.
Ça n’était pourtant plus son enclave, son domaine, son territoire de chien tordu.

Qui a eu le plus de chance ? Lui ou nous ?
À bien y réfléchir, et à la lumière d’éléments nouveaux, ce chien nous a emmerdés jusqu’au bout, sur cette portion de randonnée.
Et j’avais bien des possibilités…

  • L’assommer — ou lui mettre un bon coup sur le museau — avec ma gourde en inox, qui était remplie et qui pesait donc un bon kilogramme.
  • L’embrocher avec la pointe en tungstène de mon bâton de marche accroché à mon sac. Dans le flanc, à la gorge, ou dans le fion, mais là il aurait pu aimer ça avec son air de pervers.
  • L’étrangler avec un bout de paracorde. Résistance cent cinquante kilos, c’est suffisant.
  • L’aveugler avec le mode stroboscope de ma puissante lampe torche à LED avant de lui casser le crâne avec sa tête dite « tactique » (dentelée, pointes en aluminium).
  • Le saigner avec mon couteau à lame bloquante (neuf centimètres, type « drop point » ou « bourbonnaise »). Et croyez-moi, il coupe et il perce/perfore !

Une fois le sort de la bête réglé, je pouvais lui trancher la tête. Si la colonne vertébrale me posait problème, j’avais mon sécateur pliant pour m’aider, ou la scie de mon fidèle couteau suisse.
Et j’aurais pu repartir avec la tête de ce chien en étendard/trophée au bout de mon bâton de marche déployé.
Et pourtant, je n’ai rien fait de tout cela.
J’ai laissé ce chien à son mal-être, à sa morgue, à ses maîtres, voire à la drogue dans ses croquettes.
Peut-être, par égocentrisme, voulait-il que je le photographie, mais je n’ai pas compris sa demande.

La bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe.
Ce chien noir n’a pas réussi à me faire sortir de mon flegme et de mon humanité.
Et pourtant, rétrospectivement, je sais que sur le moment toutes ces idées me sont passées par la tête.

© PF/Grinçant.com (2022)

2 commentaires sur “La bave du chien noir”

  1. Avatar photo

    J’me disais, si jamais je croise ce PF, j’lui fais une tête… finalement, je vais le laisser tranquille :D

    Petite anecdote, en promenade avec mes gamins, nous avons été « guidés » par un berger allemand et deux malinois assez décidés à ne pas laisser leur « propriété » visitée (incluant une zone démilitarisée périphérique de 100 bons mètres, soit un espace public privatisé). C’est finalement un ridicule Jack Russel hargneux, mais plus courtois envers nous que les bergers, qui nous a débarrassés de ces racailles poilues !

    1. Avatar photo
      PF/Grinçant.com

      Oui, il vaudrait probablement mieux me laisser tranquille. ;-)

      Au-delà de l’anecdote bien réelle et de mon attirail possiblement défensif à ma disposition sur ce coup, il y a un seul mot en gras et il s’agit d’une (puissante, mine de rien) allégorie.
      Et en parlant de « racailles », remplacez donc ce chien noir par un Castex, un Véran, un Attal, ou mieux, un Macron…

      Ce chien a probablement eu l’impression de « gagner », mais en fait il revient de loin, et la prochaine fois — ou avec quelqu’un d’autre —, ça pourrait tourner (très) mal pour lui.

      Concernant les chiens en randonnée :
      — À la rencontre de la louve de Saarloos (19/12/2020)
      — Border-Collie, Patou et Dahu-Lama (19/07/2018)

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