Trois mois déjà, un acte qui allait lui être fatal avait eu lieu.
Avec cette fécondation comme résultat, cet acte réfléchi, mais irraisonné lui permettait maintenant d’entendre les battements de deux cœurs.
Au chaud et nourri par ce qui ressemblait à un serpent, il commençait à éprouver certaines sensations.
Des mouvements lui permettaient de flotter agréablement dans cet univers sirupeux.
Cette mouvance lui faisait comprendre ce qu’était la vie dans la vie.
Les jours passaient, les semaines également.
Son cœur rythmait sa prise de poids.
Des bruits lui parvenaient.
Y avait-il un voisin derrière l’une des cloisons ou était-ce dehors ?
De plus en plus souvent, il sentait une légère pression sur son corps, tout en entendant des sons aigus et d’autres plus graves.
Son évolution était suivie à l’extérieur !
Il pressentait, sans vraiment pouvoir le visualiser, ce que serait le monde le jour de son inéluctable sortie.
Il commençait à être inquiet.
Intellectuel il serait, intellectuel déjà il était.
Que de souffrances à prévoir !
La crainte serrait son petit ventre par lequel arrivaient les substances nourricières.
Pouvait-il arrêter ce processus ?
Il fallait chercher !
Non, décidément, il ne voulait pas sortir !
Il chercha des solutions.
À s’étouffer, il songea, mais il n’arriva pas à retenir sa respiration suffisamment longtemps.
Avec ses petites mains il essaya d’arracher le cordon ombilical, mais en vain.
Avec sa bouche, il tenta aussi, mais ses gencives étaient molles.
Décidément, les choses allaient plutôt mal !
Il chercha une arme blanche, mais il n’en trouva point.
Pour cela, il fallait sortir !
Des contractions…
Encore des contractions…
Tout bouge !
Il se sentait poussé vers l’extérieur, irrésistiblement.
Avec ses doigts, il s’agrippa, mais le mouvement continuait.
Affolement !
Bientôt, il ne serait plus ce qu’il était !
De l’air, de la lumière, et puis un cri : « COURAGE ! »
© PF/Grinçant.com (Projections 1992-1993)